Avec Manslaugher, ils avaient pris tout le monde par surprise. Maintenant qu’ils savent qu’on les attend, Ice T et sa bande ont la lourde tâche de confirmer. Et là tout de suite maintenant, la seule chose qui est confirmée et le penchant pour les artworks moches de Body Count.

Bloodlust peut se voir de plusieurs façon. Comme un n-ième album de Body Count avec Ice T pas content qui parle de la vie dans les ghettos et des injustices subies par les plus pauvres aux USA – endossant de fait le rôle de porte drapeau des défavorisés. Ce qui nous amène à l’autre approche par rapport à ce disque: celui de premier pamphlet musical de la présidence Trump. Tout ça délicatement accouplé à un Metal incisif et inspiré comme Body Count n’en a pour ainsi dire jamais proposé.

Du coup la question n’est pas de savoir si Bloodlust est un bon album mais « juste » de savoir si ce n’est tout simplement pas le meilleur album de Body Count. Rien que ça.

L’album débute par un monologue digne de Big Brother annonçant la mise en place de la loi martiale aux USA – monologue d’autant plus savoureux qu’il est prononcé par Dave Mustaine, républicain affirmé et convaincu. S’en suit un titre son sombre, violent, à la puissance brute servi par un solo génial – signé Mustaine. Le ton est donné. Rarement Earnie C et son compère Juan ont été si inspiré en matière de riffs et d’ambiance  – Bloodlust (la chanson) est un régal en matière d’ambiances qui font froid dans le dos, tout ça poser sur une rythmique qui tombe juste à chaque fois. Les breaks sont là où il faut, et ça tabasse avec une précision qui ne renierait pas Slayer. Puisqu’on parle de Slayer, comment passer sous silence le medley Reign In Blood/Post Mortem repris par le groupe. L’intro du morceau le plus haineux de Slayer prend ici une dimension hors du commun grâce à la prod dantesque signée Will Putney. Ces coups de toms sont d’une puissance tellement jouissive qu’on a envie de tout faire voler autour de soit et de se déboîter les cervicales tellement ça avoine. Difficile également de passer sous silence l’excellente Black Hoodie, probablement le hit de l’année, qui illustre parfaitement toutes les qualités de cet album – plaçant au passage un l’imparable sample de Sound Of Da Police de KRS One.

A côté de ça, Bloodlust sait aussi se montrer plus fin. Distillant au travers de titres comme This Is Why We Ride des paroles ciselées et parlantes comme seul un Ice T enragé peut en pondre, tout ça dans une ambiance digne du Suicidal Tendencies des grands jours – les rafales de mitraillettes en plus dans le cas présent. C’est tellement efficace qu’on visualise sans aucun problème chacune des chansons et son déroulement. A ce titre la plus flippante/réussie est sans doute The Ski Mask Way. Toujours dans la veine « torrent de haine », la très « Lamb Of Godienne » Walk With Me… – qui voit par ailleurs la participation de Randy Blyth, se pose là et propose même un peu de blast. Ouais… du blast dans un album de Body Count.

C’est donc fait, Body Count a confirmé que Manslaughter n’était pas un coup de bol et l’a fait de la meilleure manière qui soit. Si comme moi vous avez suivi l’enregistrement de l’album, vous aviez sans doute remarqué que les mecs avaient l’air ultra confiant, conscient qu’ils avaient écrit un disque qui allait mettre tout le monde d’accord. Ne restait qu’à savoir jusqu’à quel point. Maintenant le monde sait que pour faire mieux que Bloodlust cette année il va falloir s’accrocher.