« Oublie que t’as aucune chance, on sait jamais! »
En appliquant à la lettre la légendaire maxime de Jean-Claude Dusse, voila comment on obtient une interview de Carpenter Brut. Ca vous la coupe? A moi aussi.

Quelques heures avant son concert au File7, Mr Brut armé de son humour piquant répond à quelques questions sur la tournée en cours, le futur de Carpenter Brut, son rituel d’avant concert, tout ça et bien plus encore.

Comment se passe ta tournée jusqu’à présent?
Bah écoute autant te dire qu’on fait des kilomètres et des kilomètres et qu’il en reste encore pas mal à parcourir. On arrive à la moitié de la deuxième partie en Europe. Jusqu’ici ça va… on a affronté les problèmes douaniers qui n’en finissent pas (ndr il fait allusion au fait qu’ils sont restés bloqué à la frontière ukrainienne quelques jours auparavant) mais ça pourrait être pire.

Justement j’allais te demander si c’était pas trop galère de rester à attendre comme ça…
Ca va! On est en tour bus donc quand tu passes 10h à la douane, tu peux en passer 9 dans une couchette et 1 à bosser ou faire des trucs. C’est juste que tu ne sais jamais à quelle heure tu vas repartir. Sinon pour l’instant y’a pas de galère.

Je m’étais laissé dire que pour l’Olympia vous aviez eu quelques soucis, non?
On est arrivé un peu en retard effectivement (rires). Ce sont des choses qui arrivent et qu’on essaie de ne pas reproduire. On a pu jouer et tout s’est bien passé au final.

Tu es un animal relativement rare en interview…
De moins en moins à force d’en faire!
…alors justement comment vis-tu la médiatisation grandissante de ton projet?
D’un côté tu te dis que si ton truc commence à avoir des plus en plus d’interviews c’est pas mal… après hormis Metal Hammer ou Kerrang! ça reste pas mal des interviews qui restent confidentielles. J’ai pas encore fait Télérama… j’ai pas foncièrement besoin de le faire d’ailleurs. Ca reste toujours des interviews un peu underground. C’est somme toute une notoriété qui est assez petite… voila quoi!
T’as pas fait France Inter?
Ha bah voila ça c’est « l’exemple »! France Inter!
J’ai fait mes devoirs!
C’est bien! Pour une fois que quelqu’un les fait! (rires)
France Inter c’était dans le cadre de Rock en Seine. C’était sympa à faire. C’était en direct en plus! Grosse pression! J’ai appris que c’était en direct au moment d’y aller! Je pensais que c’était un truc enregistré…
Comment je gère ça? D’un certain côté je trouve ça bien parce que le projet commence à être de plus en plus connu. En fait pour moi le principal intérêt à être connu c’est de gagner de l’argent en faisant des concerts pour pouvoir le réinvestir pour avoir plus de matériel et faire un show plus gros. C’est juste ça. C’est pas le nombre de like sur Facebook qui m’intéresse. Mais la contrepartie du truc c’est que d’une part tu t’exposes plus et à chaque fois que y’a une espèce de hype autour d’un projet, le public peut vite s’en lasser aussi. Donc faut réussir à trouver une sorte d’équilibre qui consiste à être discret mais là pour pas que les gens disent « ha putain Carpenter! Encore lui on en a plein le cul ».

Parfait du coup tu permets d’embrayer sur la suite!
J’essaie toujours de faire en sorte que tes enchaînements soient fluides!
(rires)
Merci! Donc tu fais de plus en plus de gros fests. Tu as cité Rock en Seine, tu as fais le Hellfest, Coachella… Comment ça se passe avec ce type de public? Car ce ne sont pas forcément ceux qui viennent te voir en Headliner.
Alors le Hellfest si un petit peu hein quand même.
Je suis vaguement au courant. J’y étais.
Ha bah tu vois! 
Le reste du temps on vend notre salade et on voit si les gens ont envie de l’acheter. En fait les festivals pour moi c’est comme les interviews, c’est de la promotion. C’est-à-dire que tu vas jouer devant plein de gens dont 90% n’a rien à foutre de ce que tu fais ou ne te connaisse pas ou n’a pas forcément envie de te voir. Et y’a toujours les dix petits pour cent que tu essaies d’attraper.
Ok mais Coachella/Hellfest c’est un peu le grand écart quand même.
C’est un peu le grand écart surtout au niveau du public parce que Coachella on avait personne. Comme ça c’est pas compliqué et au Hellfest il y avait beaucoup de monde. Mais c’est vrai qu’au niveau de la thématique du festival, c’est le grand écart c’est vrai.
Le Hellfest, je ne sais pas si de la scène tu voyais, mais y’avait un monde fou. Ca sortait du chapiteau et quand le concert s’est terminé, les gens ont chanté Maniac dans le camping jusqu’à pas d’heure.
(regardant son manager qui pianote sur son ordi dans un coin de la pièce) Heureusement qu’on la repend celle-là PUTAIN! (rires) Parfait! Tant mieux! C’est ça qu’il faut! C’est que les gens s’amusent! Bon ça répond pas vraiment à ta question. Au pire tu changeras la question pour que ça ressemble à quelque chose! (rires)
Mais tu as ressenti cette ambiance de folie sur scène ou pas du tout?
On joue avec des ‘ear monitor’, on sent moins le public gueule ou pas même si on a des micros d’ambiance. Mais fatalement tu arrives quand même à sentir si les gens s’amusent dans une salle où c’est le bordel ou si les gens se font chier. Au Hellfest y’avait vraiment une grosse, grosse ambiance. Y’a des pays comme ça aussi où ça bouge. La Russie, Moscou, à chaque fois c’est l’Armageddon. Y’a des pays où c’est un peu plus contemplatif même si y’a de grosses ambiances, genre en France.  Et puis y’a les pays nordiques… les gens s’amusent quand même mais ils sont pas démonstratifs.

Puisqu’on parlait du Hellfest, je vais y revenir. Matt de Grave Pleasures est venu pousser la chansonnette avec vous. Comment ça s’est monté? Vous avez demandé aux orgas?
En fait dès qu’on a l’occasion de jouer pas loin, on le fait. On a refait le coup en Finlande sur un autre festival parce qu’il jouait. Ou non en fait il est juste venu pour ça. Ou il jouait le lendemain… bref on s’en fout mais dès qu’on peut le faire on le fait parce que c’est cool, ça change. Là on a joué en Norvège, y’avait Garm (Kristoffer Rygg d’Ulver en guest sur Cheeleader Effect -ndr) qui était là. Je ne lui ai pas demandé parce qu’il est un peu plus timide, un peu plus réservé. On s’est vu après, on a passé un chouette moment mais je ne me voyais pas lui demander. Matt par contre est assez friand de ce genre de truc. Ca l’excitait bien de le faire. On ne va pas l’emmener en tournée avec nous tout le temps, juste pour une chanson ce serait con (rires).

Je vais revenir sur les concerts. Côté setlist, est-ce que vous la faites tourner ou bien vous êtes bridés par tout le setup avec l’écran?
C’est toujours la même. Tout est synchronisé. Les vidéos, les lights donc si on change un truc, il faut refaire tous les timecodes. Pour changer un truc c’est un gros paquet de boulot. Pour rajouter une boucle c’est tout un merdier, il faut tout réadapter.
Et on joue le même set parce que c’est important que les gens, quel que soit l’endroit où ils viennent nous voir, voient la même chose. Je ne vais pas faire un set spécial pour l’Olympia sous prétexte que c’est l’Olympia. Je trouve ça dommage d’adapter et de faire un set particulier pour une ville. Y’a pas de raisons qu’une petite ville en Suède n’ait pas droit à la même chose.
Je te demande parce que je me disais qu’à force de faire la même chose tous les soirs, il va peut-être y avoir un moment où tu vas en avoir marre.
Ha bah si forcément! On en a marre. Mais si les gens s’amusent, ça nous fait plaisir. Après si les gens se font chier, oui c’est un peu « la totale ». C’est un peu difficile.

Tu parlais tout à l’heure de réinvestir l’argent que vous gagnez dans plus de matos pour faire un show plus gros. Du coup, à quand Bercy!?
(rires) ben écoutes Bercy on y pense!
Sérieusement?
On y pense en rigolant! Déjà peut-être avant un Zénith. Et à quand Bercy… peut-être un jour à la fin de ma carrière. En fait le problème de Bercy c’est que c’est une salle de 18 000 places et je ne me vois pas intéresser 18 000 personnes. Ou alors faut faire une seule date, que tout le monde vienne de France et faut faire un show de 2 heures. Là faut vraiment faire un gros show, un peu comme quand U2 vient et qu’ils font qu’une date ou deux.
En fait je te demandais ça parce que je t’ai entendu dire dans une interview que si l’Olympia était complet c’était cool et que si ça ne l’était pas c’est que vous vous étiez loupés quelque part. Là tu me donnes l’impression de revoir tes ambitions à la hausse.
En fait mes ambitions ont toujours été à la hausse depuis le premier jour. C’est-à-dire que je veux faire un show à la Nine Inch Nails. Ca me fait kiffer de voir ces trucs là et j’ai envie de me dire « moi aussi je veux proposer un truc comme ça ». Et le problème pour faire un show comme ça, c’est que ça coûte énormément d’argent. Je n’aurais jamais la notoriété de Nine Inch Nails donc on revoit les choses un peu à la baisse quand même. Mais ça ne m’empêche pas de vouloir faire des trucs qui claquent visuellement. Pour 2020 et la prochaine tournée, on réfléchit à des trucs motorisés qui bougent au-dessus la scène.
Ha ouais… carrément!?
Ouais carrément. En fait c’est ça qui m’excite dans les concerts parce que les tournées ne me passionnent pas vraiment. Cette année, on aura été 3 mois chez nous. Sur 12 mois ça ne fait pas beaucoup. Donc il faut que ça vaille le coup de ne plus voir sa famille, de ne plus voir ses potes. Il faut VRAIMENT que ça en vaille la peine.

Alors pour toi est-ce que ça vaut la peine de partir dans une tournée aux USA où tu seras ouvreur pour Ministry alors qu’ici tu es headliner? Où c’est juste pour voir Ministry?
Ministry je n’ai rien contre. C’est un groupe dont j’entends parler depuis que je suis jeune. Mais c’est surtout une opportunité de jouer devant d’autres gens. Et aussi je pense que c’est bien de ne pas faire que du headline. C’est rentré dans une sorte de facilité. Tu peux aussi vite te prendre le melon, vu que t’es accueilli à chaque fois comme le principal groupe. Donc là c’est bien, on va se refoutre dans des conditions un peu compliqué avec pas beaucoup de place sur scène, peu de temps de changement de plateau…

Vous aurez l’écran quand même?
Non on n’aura qu’un projo. Ce ne sera pas du tout la même chose. Y’a des gens qui vont revenir nous voir, qui nous ont vu tourner aux Etats-Unis avec le mur de LEDs, le « gros show » en quelque sorte et qui verront un truc plus petit budget. Mais je te dis, pour nous c’est surtout l’opportunité de jouer devant des gens qui ne seraient pas forcément venu nous voir.
D’un autre côté Ministry, ce n’est plus aussi bon que ce que ça a pu être.
Oui alors tu sais, est-ce qu’ils ne se servent pas un peu aussi de la notoriété des groupes qu’ils amènent en tournée pour remplir la salle? C’est du business aussi. Si vraiment ça me faisait chier, je ne le ferai pas.
J’ai cru comprendre!
Y’a des trucs qu’on n’a pas fait, auxquels on a dit non. Bon je ne peux pas te dire qui hein!
C’était pas ma question!
Oui bah c’est ma réponse! (rires)


Vidéo copyright David A.D Photographies

Revenons-en à Leather Teeth si tu veux bien. Pour un album comme ça avec 8 morceaux, combien en as-tu composé?
J’en ai composé au moins une vingtaine. A la base je voulais en mettre plus de 8 et en les réécoutant, j’ai trouvé que ça n’allait pas, que ce n’était pas dans le délire. Ils étaient peut-être intéressant à leur manière mais ne collaient pas avec le reste. Et je n’ai aucun problème à jeter. C’est pas bien? C’est pas bien! De toute façon tu le sens quand quelque chose ne colle pas dans un morceau.
Donc tu n’as rien gardé pour éventuellement recycler ou les sortir plus tard?
Recycler ça me fait chier. Ca veut dire que quand on te demande un morceau un peu inédit, c’est arrivé une fois ou deux, tu dois ressortir ces trucs. Je rechigne un peu à le faire. Si il est inédit c’est que y’a une bonne raison. C’était pas un morceau assez valable pour être dans un album. Ca peut aussi être un morceau qui est valable tout seul mais qui n’est pas dans le délire du disque. Donc il faut que je le finisse et qu’il ait quand même un intérêt. Bof.
C’est ce que tu avais pour les B.O. de jeux?
Pour Furi j’ai composé exprès. Pour Hotline Miami et The Crew, ce sont des morceaux qui étaient sur mes EPs. Le truc c’est qu’on me demande assez souvent des morceaux et que je suis sur la route. Donc plutôt que de leur filer des crottes ou de faire un truc à l’arrache, je préfère leur donner un morceau existant pour gratter 2000 balles.

Puisqu’on parle de compos. Quand tu te poses derrière ton clavier, tu sais où tu veux aller ou c’est YOLO?
Haaaaa non c’est jamais YOLO! Je ne peux pas te dire exactement où je vais mais j’ai une idée, je vois comment ça s’enchaîne, le feeling… des fois je cherche des sons je me dis « tiens ça c’est pas mal ». Je regarde comment je pourrais l’intégrer avec le reste pour construire l’histoire. Je tâche de trouver un petit son « original ».  Par exemple, Leather Teeth je l’ai fait avec un petit synthé que j’avais et que j’aimais bien. Il me sortait ce petit « hin hin » qui est « iconique » du morceau (il se marre tout seul). Et j’essaie d’avoir un file conducteur au niveau de l’histoire.
Donc t’as pas vraiment de méthodo?
Ha non! Je repars de zéro à chaque fois! Ca m’arrive parfois quand je sais quel type de morceau je veux faire de rouvrir une ancienne cession, j’efface les notes mais je garde tous les instruments. Ca évite de trop se répéter. Après là où je me répète c’est dans les suites d’accords. Je ne suis pas un grand musicien donc j’ai un peu tendance à tourner autour des mêmes notes (il pianote sur la table), autour des mêmes placement de doigts. C’est une habitude qu’il va falloir que j’essaie de perdre.
C’est marrant que tu dises ça parce que je trouve que certains de tes morceaux ont des structures similaires. Run Sally Run par exemple et What We Fight For suivent un peu la même structure. Ca va crescendo puis explosion finale.
Ha bah ouais mais c’est un peu comme si tu me disais que Madball ou Sick Of It All ont des morceaux qui se ressemblent! (rire général)
Ouais mais ça fait 20 ans qu’ils se mordent la queue!
OUI! Mais c’est toujours cool! Le dernier Madball et le dernier Terror je les trouve excellents!
Ho pi ça reste de la musique…
C’était pas absolument pas critique hein!
Ca aurait pu l’être!
Je ne vais pas arriver et te dire « salut tu fais de le merde »!
Bah qu’est-ce que tu fous là alors? (l’air faussement outré)

Tout le monde se marre.
La conversation part dans tous les sens avant qu’on enchaîne.

Bon question suivante!
Y’a-t-il un morceau dont tu es particulièrement fier?
Ouaiiiiiis alors oui et non. Quand t’as 4 enfants tu préfères lequel?  Mmmm NON.
Alors à contrario, y’en a-t-il un qui te fait chier?
Certains vieillissent plus mal que d’autres. Surtout ceux du premier EP. Certains qu’on ne joue plus en live comme Wake Up The President qui ne correspond plus à ce qu’on peut faire sur scène. Même si il reste efficace et que ça permet de faire une pause pour ceux qui sont fatigués pendant les concerts…
Mais non pas vraiment de titres que je déteste ou qui m’emmerdent. Ils vieillissent et puis je ne suis pas dans le même état d’esprit en 2018 qu’en 2012. Et je ne sors des trucs que dont je suis satisfait. Je n’aime pas la demi-mesure. Tu vois je sais que y’a des gens qui n’aiment pas Leather Teeth, moi je l’aime parce que je sais comment je l’ai fait, je sais pourquoi je l’ai fait comme ça, je sais dans quelles conditions je l’ai fait. Après qu’il y ait des gens qui ne l’aiment, ça les regarde et ne me pose pas de souci.

Du coup j’imagine que le prochain album est déjà dans les cartons? Ou que tu as au moins une idée de ce que tu vas faire?
Ha bah oui! J’ai reconstruit le bordel comme une trilogie donc on repart au moins pour 2 autres albums. Le prochain suit l’histoire. Donc là c’était assez soft parce que c’était un jeune étudiant qui tombe amoureux d’une fille. Et du coup il est défiguré, il devient une Rock star pour draguer les meufs… et les violer… et les tuer. Il devient un serial-killer dans le deuxième album donc tu imagines bien que le deuxième sera un peu plus véner’, un peu plus sombre.
Et là les gens vont dire « HA CA Y EST IL RETOURNE A SES SOURCES » blah blah blah!
C’est exactement ce que j’allais te demander.
Ce sera pas vraiment un album retour aux sources parce que je pense qu’il sera un poil plus indus. Avec un poil plus de cinématographie dans les ambiances. Il sera peut-être moins electro-rigolo tu vois!
Donc si je te dis que dans tes morceaux, j’entends déjà des gens qui ont fait des grosses B.O. de film comme Moroder, Faltermeyer ou Vangelis, ça te choque?
Non parce que les B.O. de ces films type Midnight Express, Blade Runner, ça fait parti de ces films qui m’ont donné envie de faire la zik. A un moment tu recraches tes influences consciemment ou inconsciemment. Je pense que la musique doit véhiculer des émotions diverses à travers le travail d’un seul artiste. Ou alors une émotion unique. Je suis assez fan de Meshuggah. On ne peut pas dire qu’ils soient dans un spectre très large mais ils ont une niche, un truc qui te déracine la gueule à chaque fois. Donc ça c’est autre chose, je suis incapable de faire ça. Je préfère quand c’est assez varié, je préfère faire passer diverses émotions. Comme dans un film, à un moment tu vas rire, à un moment tu vas pleurer etc.

Je me permets de revenir un peu arrière. Tout à l’heure tu as évoqué  l’après Carpenter Brut. Tu as une idée pour l’après ou bien tu verras quand tu y seras?
Non non j’y réfléchis! Je sais déjà que je ne vais pas pouvoir continuer à tourner pendant 20 ans. Je commence à être vieux (rires). Je me suis mis le challenge de faire 2 autres albums. Ca va nous emmener jusqu’en 2025 à mon avis. En 2025 j’en aurai 48… donc je crois que Carpenter Brut s’arrêtera de sa belle mort et que je ferai de la production ou des musiques de films ou des musiques de jeux. Parce que là ça me permet de me faire un CV, de démarcher des gens… quoique là j’ai même pas besoin ce sont eux qui viennent me voir. J’espère éviter de dire trop souvent « non ».

Nous avons évoqué les années 1980 avec Vangelis et Moroder. As-tu la sensation d’avoir « déringardisé » la musique de ces années là?
Bah déjà, est-ce qu’elles étaient ringardes? La B.O. de Blade Runner je ne la trouve pas ringarde.
Oui bon Blade Runner c’est un peu le pinnacle en matière de B.O…
On peut pas vraiment taper plus haut.
Mais je vois ce que tu veux dire. Ce que je trouve cool, c’est d’avoir pu réussir à ressortir ces sonorités et d’avoir pu les mélanger avec quelques choses de plus actuel. En fait c’est une question de note et pas une question de son. J’arrive à faire des morceaux violents avec des mélodies débiles et le mix a l’air de plaire à des gens. J’avoue que je n’y ai pas trop réfléchi, c’est une question de feeling.
Par contre si ça peut permettre à des jeunes générations d’aller écouter des trucs des années 80 et qu’ils y trouvent du plaisir c’est cool.
Je dois confesser qu’en préparant l’interview j’écoutais de vieilles compils de synthé où les mecs reprenaient les Chariots de feu ou le Flic de Bervely Hills…
Mais ouais! C’est de la bonne musique! Les bonnes mélodies! Ce sont de bons morceaux! Après la sonorité va être datée pour certains ou un peu ringarde mais ça fonctionne. Tu prends la guitare acoustique, tu rejoues n’importe quoi avec, un bon morceau c’est un bon morceau.

La question Ghost! Inévitable!
HA!
Ghost avec un H?
Heu oui… ha oui il y a GosT aussi!
Bah oui c’est compliqué (rires)
Comment ça s’est passé pour ton remix de Dance Macabre?
Tobias (chanteur de Ghost – ndr) m’a envoyé un email. On était aux Etats-Unis, Prequelle n’était pas sorti et il me demande si ça m’intéresserait de reprendre Dance Macabre. Alors avec plaisir mais envoie-le moi parce que je ne sais pas à quoi ressemble ton morceau. Pi ça a été tout un bordel c’est parti dans les managers, le FBI… J’ai reçu plein de mails de plein de monde. J’ai eu plein de gens mais Tobias a disparu de la circulation.
Ceci dit aussi bizarre que ça puisse paraître, on se parle assez régulièrement. Il était à notre concert de Stockholm. Il n’est pas venu me voir mais j’ai des SMS qui prouvent qu’il était là. On n’a pas pu se serrer la paluche, je suis un peu frustré de ça. Mais on s’envoie des messages. Je ne dirai pas que c’est un ami mais c’est quelqu’un que j’estime beaucoup et que je suis content d’avoir dans mes connaissances. Il aime bien ce que je fais, moi j’adore ce qu’il fait.
On a vraiment plein de points communs sur plein de trucs. Tu vois par exemple, tu prends le clip qu’il a sorti pour Dance Macabre. Les Meufs qui dansent en legging, ça me fait tellement penser au clip du Perv que j’ai fait il y a 6 ans. Je ne sais pas si je l’inspire consciemment ou inconsciemment. C’est comme le solo de sax’ (sur le titre Miasma de Prequelle)… Je sais par personne interposée que je fais parti de ses influences. Donc voila ça me fait plaisir de me dire que j’apporte une micro pierre à l’édifice de Ghost que je respecte énormément.

J’ai vu qu’au dos des autocollants Carpenter Brut, il y avait des phrases chelou. Qu’est-ce que c’est? pourquoi? comment? J’ai pas trouvé la trad’.
T’as pas trouvé la trad? HAHAHA bah écoute c’est du cajun… ou du créole je ne sais plus. Ca vient d’un film d’horreur.
AH! donc c’est pour ça que Google Trad était en PLS.
Ha bah oui t’as du faire fondre ta carte mère! Ca vient de Chucky en fait. C’est l’incantation de Chucky.
On ne laisse rien au hasard!
Jamais!
Parce qu’à mettre une phrase au dos des autocollants, autant que se soit un truc cool!

Est-ce que tu as un petit rituel d’avant concert?
Ouais! Je gueule « GRUSSETO » et avec Adrien (son guitariste – ndr), on se verse un petit godet de Whisky avant d’attaquer. Voila.
Et puis si c’est lui il dit « FRANCKITO » et voila!
Après on dit pas mal de conneries, (regardant son tour manager) on fait chier le tour manager (les 2 éclatent de rire). Ca casse un peu le mythe peut-être mais notre seul rituel c’est le « grusseto ».
Tour manager – mais « franckito » ça révèle ton nom!
Bah mon nom c’est Franck B Carpenter! C’est le même au dos des t-shirts, c’était même dans le générique. D’ailleurs on l’a enlevé sur cette tournée. J’aimais bien, ça permettait de remercier tout le monde et ça voulait dire aussi « pas de rappel! Terminé! Rentrez chez vous ».

As-tu un coup de coeur musical en ce moment?
Est-ce que j’ai un coup de coeur en ce moment? bah écoute le meilleur moyen c’est de regarder dans mon bordel.
(il attrape son téléphone).
Je ne sais pas pourquoi je me suis remis à Dream Theater.
HO MON DIEU. PAS TOI!
Si si… 
Non mais Dream Theater c’est un peu le tue l’amour.
C’est vrai… (il prend un air faussement outré) mais c’est moi qui suis interviewé ou merde?
(rires)
J’aime bien Drab Majesty. C’est un truc goth, dark. J’ai toujours du Pink Floyd, du Van Halen. J’ai aussi du Behemoth, Terror, Archive, Maiden, Prodigy, Samael, Coroner etc… j’ai pas fini d’écouter le dernier Deicide mais ça m’avait l’air bien old school.
Il est énorme! Probablement leur meilleur depuis Stench Of Redemption donc 2004 je crois.
Ha bah moi je me suis arrêté à Once Upon The Cross. Donc c’est encore plus vieux. J’aime bien la pochette!

Bon, la petite dernière!
Un mot pour les lecteurs? (rires)
Non mais c’est une question con.
ENCORE? (rires)
Pardon.
Parmi les gens originaires de Poitiers, entre le patineur Brian Joubert et toi…
…lequel est le plus connu?
Merde tu m’as venu venir!
De loin! (rires) Ho ça doit encore être Brian je pense. Il a été médaillé olympique lui, non?
Alors tu sais que j’ai une petite blague. Chaque fois que je prends l’avion pour aller quelque part, je me dis que je suis peut-être le plus connu de l’avion. Voila, c’est complètement débile mais ça me fait marrer.
Sinon je dirais Brian par respect pour ses médailles. Moi j’ai rien, j’ai pas de disques d’or.
Et puis écoutes, la prochaine fois que tu vois Brian, tu lui demandes. Et tu lui diras que moi je le connais et que lui ne me connait pas! 

La question bonus arrachée en toute fin d’interview parce que j’avais oublié de la noter!
Est-ce que tu joues aux jeux vidéo?
Là je suis comme tout le monde j’attends Red Dead 2 et puis Cyberpunk 2077! D’ailleurs en Pologne il y avait un des mecs qui bossent sur le jeu à notre concert. Il m’a dit qu’on était pas près de le voir. Donc ouais, j’aimerai! Mais j’ai pas le temps.


Un immense merci à Carpenter Brut pour m’avoir consacré un peu de son précieux temps ainsi qu’à NoQuarter Prod et l’équipe de tournée pour avoir rendu l’interview possible.